Dans le street-art aussi, les femmes sont à la rue !

Oeuvre de Kashink, Paris 3e

80 % des artistes exposés dans les galeries d’art sont des hommes ! Et pourtant, s’il y a bien un secteur qui ne connaît pas de genre, c’est celui de l’art, un monde qui met avant davantage les œuvres que leurs créateurs. Même là il reste plus difficile à une femme d’accéder à la reconnaissance. Dans le street-art aussi, les femmes sont à la rue !

Et pourtant, s’il reste difficile de donner un chiffre précis, le street-art au féminin donne aux femmes un espace (public) d’expression hors norme mais, lui aussi, encore méconnu. En effet, qui n’a jamais entendu parler – au moins une fois – de Banksy, JR, Invader, Jordane Saget, Jef Aérosol, Above, JonOne, Seth… pour ne citer que certains des plus (re)connus. Ou plus exactement sûrement avez-vous déjà vu une de leurs œuvres qui ornent les murs des villes. Difficile d’y échapper lorsque l’on habite Paris par exemple.

Mais qui connaît ou a déjà entendu parler de Kashink, Tatyana Fazlalizadeh, Swoon, Shamsia Hassani, Miss Van, Clare Rojas, Lady Pink, Maya Hayuk, Miss Tic, Anne-Laure Maison… ? Et oui, même dans le street-art, les femmes restent moins connues et moins médiatisées que les hommes. Pourtant, la rue leur appartient aussi !

Quelle est la place des femmes dans l’art ?

L’art malheureusement ne fait pas exception lorsqu’il s’agit d’évoquer la place des femmes. À l’image de ce que l’on peut observer dans d’autres secteurs, elles ont tout autant de mal à accéder aux plus hautes fonctions. Les chiffres parlent d’eux-mêmes depuis des années. Déjà en 2006, un rapport du ministère de la Culture pointait les inégalités :

  • Les hommes représentaient-ils 92 % des directeurs de théâtre consacrés à la création dramatique
  • 89 % des dirigeants des institutions musicales
  • 86 % des responsables des établissements d’enseignement artistique

Mais le constat est tout aussi dramatique parmi les artistes eux-mêmes :

En 2008, 8 % seulement des 2 000 musiciens de jazz recensés étaient des femmes !

L’art contemporain reste l’apanage des hommes

Le monde des collectionneurs d’art contemporain français apparaît ainsi animé par des femmes mais régi par des hommes ! Si la place des femmes a considérablement évolué depuis 40 ans selon les résultats de recherche menée sur les collectionneurs d’art contemporain (Mercier, 2011), les femmes souffrent aujourd’hui encore d’une reconnaissance assez faible malgré un investissement personnel de plus en plus fort.

Que nous apprend cette étude ? Les femmes ne représentent que 7 % des collectionneuses d’art contemporain. Mais elles sont souvent majoritaires au sein des associations dédiées à l’art contemporain.

Une plus faible représentation des femmes… partout dans le monde

Selon une étude de la sociologue Sylvie Cromer sur « les représentations sexuées dans les spectacles pour le jeune public », portant sur 729 spectacles (saison 2006-2007) et 1 262 personnages. Il apparaît que ces spectacles sont créés majoritairement par un homme (52 %), 14 % par des femmes, et 34 % par des équipes mixtes.

De plus, les personnages représentés sont majoritairement des hommes (45 %), contre 28 % des femmes, 14 %, des garçons, 12 % des filles.

Mais la France est loin d’être une exception… malheureusement. Ainsi, en 1989, le groupe d’activistes féministes les Guerrilla Girls placarde dans les rues de New York des affiches qui interpellent : « Faut-il que les femmes soient nues pour entrer au Metropolitan Museum ? Moins de 5 % des artistes de la section d’art moderne sont des femmes, mais 85 % des nus sont féminins ».

Les femmes ne sont donc pas exposées dans les galeries, elles ne sont pas non plus sur scène ou à l’écran, elles accèdent moins facilement aux postes de décision… Alors où sont-elles ? Dans la rue !

Les femmes s’emparent de la rue

Puisqu’elles ont du mal à entrer au musée ou dans les galeries, alors autant rester dans la rue ! Et depuis quelques années, les street-artistes féminines s’exposent de plus en plus… Mais on ne le sait pas toujours.

Elles sont en effet de plus en plus à investir la rue pour laisser parler leur créativité et surtout trouver un espace d’expression et d’exposition. Mais difficile lorsque l’on est un simple passant de savoir si c’est une femme ou un homme qui se cache derrière un mur graffé. Difficile également d’estimer le nombre de femmes street-artistes. Mais une chose est sûre : quel meilleur endroit finalement que la rue comme terrain d’expression.

Les street-artistes, des femmes ambitieuses !

Je ne résiste pas à la tentation également de relayer un épisode la web-série documentaire Les Ambitieuses de Mathilde Bourmaud, une de mes comparses pour les TEDxChampsÉlyséesWomen.

Mathilde est partie à la rencontre de Jessy, 34 ans, alias Doudou Style :

Si la ville est le miroir de notre société et les murs ses traits qui l’ont dessinée, Jessy, alias Doudou Style, tente d’en retracer certains contours depuis une dizaine années.

 

Vous pouvez également lire l’article associé : Femme et artiste graffeuse, comment Doudou Style a conquis l’espace public aux yeux de tous

Les femmes, aussi jetées hors de la rue

Oui mais voilà, malgré tout, même dans la rue, les inégalités persistent. Ainsi, les street-artistes masculins restent davantage mis en avant, exposés, estimés, reconnus et « cotés ». Pourtant, ce n’est pas que les femmes manquent, surtout dans les grandes villes.

Ainsi, en 2016, La Ville de Paris a décidé d’avoir une œuvre de street-art par arrondissement. Une belle initiative… qui fait la part belle aux street-artistes masculins ! En effet, parmi les street-artists désignés : que des hommes !

Les 10 premiers heureux élus sont ainsi : Hopare, 2shy, Shaka, Marko93, Da Cruz, Psyckoze, Alex, Zenoy, Astro et Lazoo réaliseront respectivement les fresques dans les 2e, 3e, 4e, 6e, 7e, 8e, 9e, 10e, 18e et 19e arrondissements.

Dans le street-art aussi, on peut se demander où sont les femmes ?

Lire aussi