Les rendez-vous de l’égalité : Carole Danancher, CEO et cofondatrice de la startup @Allvibes

Carole Danancher, CEO et cofondatrice de la startup @Allvibes

Diplômée de l’Edhec Business School, en 2014, Carole Danancher a décidé à 27 ans de tenter l’aventure de l’entrepreneuriat. Pari réussi puisque sa startup, Check It Out – qui édite l’app mobile Allvibes –, est aujourd’hui hébergée au sein de Station F, le plus important campus de startup au monde. Elle partage avec nous sa vision d’entrepreneure mais aussi de femme du numérique. Les rendez-vous de l’égalité : Carole Danancher, CEO et cofondatrice de la startup @Allvibes.

Si 40 % des entreprises individuelles en France sont aujourd’hui créées par des femmes, seules 10 % des start-ups le sont par une femme. Une situation qui n’a rien d’unique car elle se répercute à l’échelle mondiale.

En effet, en 2017, 70 % des start-ups dans le monde ne comportent aucune femme dans leur conseil d’administration selon une étude menée par la Silicon Valley Bank. Un pourcentage à la hausse puisque « seules » 66 % des start-ups ne comptaient aucune femme dans leur CA en 2016. Mais le constat s’applique essentiellement aux fonctions à hautes responsabilités : 54 % des start-ups n’intégraient que des hommes à ces postes, soit près de 10 % de plus par rapport à 2016.

Les rendez-vous de l’égalité avec Carole Danancher, CEO et cofondatrice de la start-up @Allvibes

C’est pourquoi, en 2018, il reste plus que jamais essentiel de donner la parole aux femmes du numérique, de les mettre en avant et de constituer des role models pour les futures entrepreneures et ingénieures de demain.

Entretien avec Carole Danancher, CEO et cofondatrice de la start-up Check It Out, éditrice de l’app mobile @Allvibes.

Carole Danancher s’est lancée dans l’aventure entrepreneuriale il y a un peu moins de 2 ans à la suite d’un constat : 9 personnes sur 10 lisent des avis clients en ligne avant leur achat.

Pourtant, ces mêmes avis clients n’ont pas évolué depuis 15 ans et restent souvent de simples commentaires écrits, pauvres en information, souvent anonymes et, pire encore, faux dans près d’un cas sur 3 selon des études de la Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF) ! Les clients cherchent des alternatives et c’est à la vue de cette opportunité que j’ai décidé d’agir. Avec mon équipe, j’ai donc lancé Allvibes.

Voir l’interview Égalité de Carole Danancher :

Allvibes, à quoi ça sert ?

Carole Danancher : Avec Allvibes, nous voulons transformer en profondeur la manière dont les clients partagent leur avis sur leurs expériences (restaurants, hôtels, shopping, etc.). Nous voulons remettre l’authenticité au cœur des avis. Notre objectif : permettre à un client de vivre une expérience avant même de l’avoir vécue ! L’application a été conçue pour conserver l’authenticité à tout prix. On peut parler de « transparency by design ». Les clients ne peuvent filmer que via l’application, ce qui nous permet de garantir l’heure, la date et la position GPS lorsqu’un avis est donné. Impossible donc de se défouler sur un restaurant dans lequel on n’a pas mis les pieds !

Allvibes est une plateforme qui permet aux clients de donner leur avis en vidéo : ambiance d’un restaurant, taille d’une chambre d’hôtel  fréquentation d’un site touristique, etc.Pour rechercher les bonnes adresses sur Allvibes, il suffit de télécharger l’appli et d’utiliser la carte géographique Allvibes : on y trouve toutes les adresses autour de chez soi et partout dans le monde ! À ce stade, nous avons déjà des « vibes » (avis en vidéo) dans plus de 50 pays.

Retrouvez la présentation de Allvibes et les conseils de Carole pour entreprendre sur le site du Monde des Grandes Écoles et Universités

Qu’est-ce qui t’a donné envie de te lancer dans l’aventure de l’entrepreneuriat ?

Carole Danancher : Comme beaucoup d’hommes et de femmes, j’ai toujours eu l’ambition et l’envie de monter mon projet. Mais dans la vie, beaucoup renoncent à ce projet par manque d’argent, d’opportunités et surtout par manque de confiance en soi. Dans mon cas, deux éléments ont été déterminants dans ma prise de décision entrepreneuriale : lors de ma mission chez Louis Vuitton à Londres, j’ai été confrontée à un management radicalement différent de ce que j’avais connu en France. À mon arrivée, on m’a demandé de faire mes preuves et, par le mérite, j’ai rapidement obtenu des responsabilités importantes. J’ai pris conscience de mes forces et j’ai surtout pris confiance en moi.

Le role model de Carole

De même, pendant cette même période, j’ai pour la première fois éprouvé une admiration débordante pour une femme dirigeante, la directrice de ma division, alors n°2 de Louis Vuitton UK. J’ai été fascinée par sa manière de manager les équipes, par son charisme, par sa détermination et par son côté très humain. Elle m’a inspirée et j’ai compris que je voulais devenir ce type de dirigeante. Quelques mois après, je rentrais en France et je me lançais.

Le numérique ne compte que 30 % de femmes environ. Ressens-tu au quotidien ce manque de représentativité et ces inégalités ?

Carole Danancher : La bonne nouvelle, c’est effectivement que le nombre de créatrices d’entreprises est en augmentation en France. La moins bonne, et je me base ici sur mes observations dans l’environnement entrepreneurial, c’est que les femmes, quand elles initient un projet, ont une forte tendance à le faire dans les secteurs dits « féminins » : mode, maternité, féminité, nourriture saine, etc. Et ce pour 2 raisons principales selon moi :

–          La 1re : entreprendre dans un secteur que l’on connaît bien a un aspect rassurant.

–          La 2e : dans les secteurs plus « tech » ou « industriels », la faible représentation des femmes est observable dès le lycée et s’accentue encore davantage lors des études supérieures. Dans ce contexte, rien d’étonnant qu’il y ait à l’arrivée peu de femmes entrepreneures !

Le message de Carole

« Aujourd’hui, je rencontre beaucoup de femmes entrepreneures mais elles sont assez rarement initiatrices de projet « tech » à proprement parler. Il semble donc important que nous montrions l’exemple et que nous servions de modèle pour orienter davantage de jeunes femmes dans cette voie. »

Un peu moins de 2 ans après avoir créé ta structure, que retires-tu principalement de cette expérience ?

Hall principal de la Station F
La Station F, le plus grand incubateur au monde – Paris 13

Carole Danancher : Mon premier enseignement est que les entrepreneur(e)s n’ont jamais toutes les clefs en main avant de se lancer. C’est donc à mon sens une erreur de repousser indéfiniment le projet d’entreprendre car on court le risque de ne jamais se lancer. Quand j’ai décidé de quitter le secteur du luxe pour entreprendre, je n’étais pas persuadée de la viabilité de mon projet, de la taille du marché et je n’avais aucune compétence technique. J’ai donc pris les choses en main et me suis formée au code informatique grâce au bootcamp du Wagon (9 semaines pour apprendre à coder). Face au mur, on apprend vite ! Pour entreprendre, il faut donc être capable d’accepter le risque que cela comporte, cette incertitude de l’avenir et avoir la détermination de se donner tous les moyens pour réussir.

Mon deuxième enseignement : entreprendre seul(e) est difficile, il est donc à mon sens essentiel de s’entourer d’une bonne équipe et/ou d’associé(e)s aux profils complémentaires pour donner toutes les chances à son projet !

 

Ton parcours étudiant mais aussi certaines de tes expériences professionnelles t’ont menée également hors de France en Corée et à Londres notamment. Quel regard portes-tu, le cas échéant, sur les différences culturelles qu’il peut y avoir d’un pays à l’autre sur la place des femmes dans le monde d’aujourd’hui ?

Carole Danancher : De mes observations en Asie et ailleurs, la place de la femme est, à l’heure actuelle, encore très différente d’une société à une autre. Cela démontre à ceux qui n’en seraient pas encore convaincus que les rôles hommes / femmes sont établis culturellement et qu’il est donc possible de les faire évoluer.

En Corée du sud, j’ai rencontré des femmes très ambitieuses aussi bien que des femmes objets.  À Londres, j’ai rencontré des femmes de tous les horizons, anglaises bien sûr mais également venant de Russie, de Chine, d’Inde ou d’Amérique Latine, chacune avec des perceptions des relations hommes / femmes très différentes, ce qui a parfois donné lieu à des discussions enflammées. Une chose est certaine : il faut des pionnières dans tous les secteurs pour montrer qu’un autre chemin est possible et je pense que des nombreuses françaises peuvent et veulent faire partie de ces pionnières.

Le saviez-vous ?

Les Françaises sont les femmes les plus ambitieuses du monde ! C’est ce que révèle le rapport “Global Gender Diversity 2016” du cabinet de recrutement britannique Hays : elles sont ainsi 64 % à vouloir occuper un poste à haute responsabilité.

Pour en savoir plus, lire l’article : Parité Femmes – Hommes : où en est-on début 2017 ?

Quels conseils pourrais-tu donner aux femmes qui désirent entreprendre ?

Carole Danancher : Lancez-vous et affrontez vos craintes ! Elles sont légitimes, mais vous ne ferez rien si vous ne les surmontez pas. N’accordez pas non plus trop d’importance aux tentatives de dissuasion de

Espaces de travail à la Station F
Espace de travail à la Station F

votre entourage ! Si certains entrepreneurs sont issus de familles d’entrepreneurs et sont incités à suivre le même chemin, d’autres, en revanche, évoluent dans un contexte où les proches sont issus du salariat. Ces entrepreneures peuvent alors être confrontées à une incompréhension de leur entourage quant à leur choix de se lancer dans une aventure si risquée, l’entourage ayant souvent une autre conception de la vie professionnelle.

C’est pourquoi mon 2e conseil est fondamental car il peut donner une chance supplémentaire de réussite à votre projet : « Sans argent, vous n’irez pas très loin… »
Il faut donc prévoir le coup intelligemment. La France est un bel écosystème pour lancer sa start-up, grâce à Pôle Emploi et grâce à l’implication des pouvoirs publics dans le financement des start-ups en early-stage (BPI, Financements des régions et départements, etc.). Il faut certes avoir la capacité à mettre un peu d’argent de sa poche, mais plusieurs dispositifs sont de vrais coups de pouce.

Les 3 hashtags de Carole

  • #Succès
  • #Ténacité
  • #Sororité

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